Samedi 22 Février à 17h et Dimanche 23 Février à à 17h
Avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan
Synopsis
Maria n’est plus toute jeune et aide des personnes plus âgées qu’elle. Tirant le diable par la queue, elle ne se résout pas à sa précaire condition et, par-ci par-là, vole quelques euros à tous ces braves gens dont elle s’occupe avec une dévotion extrême… et qui, pour cela, l’adorent… Pourtant une plainte pour abus de faiblesse conduira Maria en garde à vue…
Retour à l’Estaque
Robert Guédiguian n'avait pas tourné à l’Estaque, un quartier du 16ème arrondissement au nord-ouest de Marseille, depuis Les Neiges du Kilimandjaro, en 2011. Le metteur en scène se rappelle : "Il y a peu, à l’Estaque, j’ai assisté à une projection en plein air de Dernier été, mon premier film tourné en 1980. C’était une fête extraordinaire. Des gens reconnaissaient leur père, qui était figurant sur le film, décédé depuis. Ou ils se revoyaient gamins faisant de la figuration. Ou constataient que la maison dans laquelle nous avons tourné était celle de leur oncle…"
"Après plus de 40 ans, c’est tout à fait unique et cela me ravit. Les habitants de l’Estaque s’approprient mes films comme s’ils les avaient eux-mêmes réalisés. Et ils sont heureux de m’y voir tourner à nouveau. Ces tournages et ces films participent à l’histoire de ce quartier. Par rapport à ce public-là, je peux dire que je suis leur obligé. Je peux même dire que j’ai fait du cinéma pour eux. J’ai toujours affirmé que je faisais du cinéma pour rendre à mes parents ce qu’ils m’avaient donné. Et bien je dirais aujourd’hui que les habitants de l’Estaque sont tous mes parents."
Dernier film de Jacques Boudet
Jacques Boudet, qui s’est éteint le 15 juillet 2024, interprète M. Toulouse dans La Pie Voleuse. L'acteur a été quasiment dans tous les films de Robert Guédiguian depuis Rouge Midi (1985) : "Jacques était la bonté incarnée. Il aimait tout le monde. Il ne faisait de tort à personne mais ne se fiait qu’à quelques-uns selon le mot de Shakespeare. C’était depuis toujours notre aîné. Il était notre mascotte. Il est maintenant notre ange gardien", confie le cinéaste.
Le personnage de Darroussin
Le personnage qu’interprète Jean-Pierre Darroussin, M. Moreau, pourrait être celui que l'acteur incarnait dans Et la fête continue !, une vingtaine d'années plus tard. Robert Guédiguian précise : "Il y a aussi forcément des projections de moi-même dans ce personnage qui avance en âge. M. Moreau ne distingue pas beauté et bonté. Moi-même je pense de plus en plus de cette manière-là. Je cherche dans les arts, la musique, la littérature, des choses qui vont dans ce sens-là."
"C’est aussi une façon personnelle de résister à l’air du temps, comme l’évoque M. Moreau. Pour combattre l’esprit du temps, il n’y a pas que la politique, dont il était question dans Et la fête continue !. On peut aussi suivre des chemins individuels, par des actes ou par une esthétique qui assimile beauté et bonté. Les deux mots sont d’ailleurs les mêmes dans certaines langues africaines."
Retrouvailles
Avec La Pie voleuse, Robert Guédiguian retrouve ses actrices et acteurs fétiches : Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Lola Naymark, Grégoire Leprince-Ringuet et Robinson Stévenin.
Des décors parlants
Chef décorateur de la plupart des films de Robert Guédiguian, Michel Vandestien est décédé en 2024. Sur La Pie voleuse, le cinéaste a sollicité aux décors David Vinez, qui avait déjà travaillé sur Et la fête continue !. Guédiguian raconte : "Michel Vandestien disait 'les décors ne sont pas de la décoration'. Ils signifient, ils évoquent, ils suggèrent. Par exemple la maison de Maria et Bruno devait raconter leur longue histoire d’amour, de chômage et d’endettement."
"Ils n’ont pas compris que le capitalisme était une machine à rêves bidons, des rêves non à vivre mais à consommer pour alimenter la course au profit, à la croissance… Tout à crédit : un salon, un canapé, une petite piscine, jolie et rafraîchissante pour l’été. Mais ils ne parviennent plus à l’entretenir, et l’eau stagne comme leur vie. Heureusement leur petit-fils, à travers sa passion pour la musique, est devenu une luciole dans leur nuit, une petite lumière vacillante."
"Mais il y a un invariant à l’Estaque : la vue est belle. C’est misère avec vue… J’ai moi-même grandi dans un appartement de 30 m2 sans toilettes, mais avec un balcon qui offrait un point de vue infini sur la mer. Je voyais le château d’If, les îles du Frioul, le phare de Marseille… Une vue imprenable ! On était face à un écran sur lequel on pouvait projeter toute la beauté du monde."
France infoculture - Marseille (avec un retour marqué à l'Estaque) est une fois encore le personnage principal du film, la caméra du réalisateur effleurant comme une caresse amoureuse la ville et son ouverture sur la mer. On survole aussi comme des paysages les intérieurs des maisons, qui en disent long sur ceux qui les habitent. Il y a aussi dans La Pie voleuse un bel hommage à la musique, qui s'invite dans toutes les séquences. Visiteuse impromptue, elle donne le ton, et un souffle vivifiant à ce très bon cru du réalisateur marseillais.
Bulles de culture - La Pie Voleuse explore avec finesse les thèmes de la précarité, de la solidarité et de l’accès à la culture.